Résistances oubliées – Mémoire(s) de la résistance allemande : un point aveugle

Jean-Marie Tixier

Considérée comme juive par les lois de Nuremberg, Inge Deutschkron a échappé à la déportation et à la mort qui lui était promise grâce au concours d'autres Berlinois. Elle a rendu hommage à ces Justes dans un ouvrage, Sie blieben im Schatten, sous-titré Ein Denkmal für „stille Helden“[1]. Il a fallu attendre le 27 octobre 2008 pour qu’un mémorial soit consacré à ces héros moins silencieux que non reconnus[2], mémorial installé dans les locaux de la fabrique d’Otto Weidt où Inge Deutschkron a travaillé entre 1941 et fin 1942. L’ombre jetée pendant plus de soixante ans sur ces Justes commence à peine à se dissiper en Allemagne : Jo Baier a réalisé un film télévisé Ce n’étaient pas tous des assassins (Nicht alle waren Mörder) en 2006, prix du public du Adolf-Grimme-Preis 2007. Le 9 octobre 2009, Marga (Unter Bauern, Retter in der Nacht[3]), réalisé par Ludi Boeken, est sorti sur les écrans allemands et a réalisé 135 000 entrées. Écrit à partir des mémoires de Marga Spiegel publiées en 1965, ce film raconte comment des paysans ont caché sa famille de 1943 à 1945.

C'est que la construction mémorielle de la résistance au nazisme a été et reste encore aujourd’hui un enjeu politique capital en Allemagne dans la mesure où elle est  susceptible de démontrer l’existence de conduites différenciées par rapport au régime dictatorial et donc de fissurer tout l'édifice idéologique qui postule une unité ontologique du corps du « Peuple » et /ou de la « Nation »[4].

La Rose blanche et les officiers supérieurs

Sur les écrans, la résistance allemande se réduit à deux mouvements : la Rose blanche et celui des officiers supérieurs. La mémoire officielle éprouve encore bien du mal à prendre en compte l’existence des autres résistants qui furent pourtant extrêmement nombreux malgré la violence barbare de la répression. Les statistiques fiables des nazis donnent une idée précise de son ampleur quantitative. Plus de 200 000 personnes furent condamnées pour motifs politiques à des peines de prison. Un million de personnes furent envoyées dans les camps de concentration, plus de 30 000 condamnées à mort et exécutées (soit pour les douze années de règne du nazisme, une moyenne de sept exécutions légales par jour). Tous les opposants n’eurent pas même droit à une procédure légale menée à son terme : arrestation arbitraire suivie de tortures, exécution sommaire, déportation en camp de concentration, enrôlement de force dans des bataillons disciplinaires furent le sort des autres. Si on tient compte également de la diaspora allemande et si on ne tait plus la part active prise par les Allemands à l’extérieur des frontières dans la lutte contre le national-socialisme, on mesure l’importance quantitative de la résistance allemande au Troisième Reich. C’est bien pourquoi si Sophie Scholl ne peut en aucun cas être considérée comme « une des rares héroïnes de l’histoire allemande », elle incarne bien « une figure devenue quasiment mythique »[5] au côté des officiers supérieurs assassinés après l'échec de l'attentat du 20 juillet.

En effet, l’importance quantitative des victimes et opposants au national-socialisme conduit à dessiner les contours d’une réalité totalement occultée depuis la fin du conflit mondial dans toutes les formations sociales concernées directement (l’Allemagne, mais aussi la France et l’Italie). La guerre mondiale a été précédée d’une guerre civile (larvée en France jusqu’en 1940, plus ouverte en Allemagne depuis la Révolution de 1918-1919 et sa répression). Pendant toute la période de Weimar, « le monopole de la violence légitime » est contesté à l’État allemand par des groupes paramilitaires[6]. Mais « guerre maudite, innommable »[7], la guerre civile étant de surcroît insupportable pour l’idéologie nationale, l’après-guerre a surtout été consacré à refonder une unité autour de mythes susceptibles de nier cette réalité. En France, les mythes gaullistes et communistes se rejoignent pour décréter que le peuple français a été résistant, occultant délibérément la part prise par les étrangers dans la résistance notamment par les Allemands[8]. En Allemagne, le mythe du « Tätervolk »[9] implique au contraire que la résistance n’a été le fait que d’êtres exceptionnels donc peu nombreux et qui, comme les autres, s’étaient laissés « abuser » avant de sacrifier leur vie. Ce mythe qui réunifie le peuple allemand dans une forme de culpabilité collective et, par un tour de passe-passe idéologique, réintègre les véritables coupables dans la communauté nationale, est énoncé très clairement par Benoît XVI le 29 mai 2006 à Auschwitz :

Le Pape Jean-Paul II était venu ici comme un fils du peuple polonais. Aujourd'hui, je suis ici comme fils du peuple allemand, et c'est précisément pourquoi je dois et je peux dire comme lui : je ne pouvais pas ne pas venir ici. Je devais venir. C'était et c'est un devoir face à la vérité et au droit de ceux qui ont souffert, un devoir devant Dieu d'être ici, en tant que Successeur de Jean-Paul II et en tant que fils du peuple allemand - fils du peuple dans lequel un groupe de criminels arriva au pouvoir au moyen de promesses mensongères, au nom de perspectives de grandeur, au nom de l'honneur retrouvé de la nation et de son importance, par des perspectives de bien-être, mais également par la force de la terreur et de l'intimidation, de sorte que notre peuple a pu être utilisé et abusé comme instrument de leur soif de destruction et de domination[10].

Traduction cinématographique d'une mythologie

L’attentat du 20 juillet est de loin l’épisode le plus représenté de la résistance allemande. Au moins une vingtaine de fictions ou de documentaires lui sont consacrés alors qu’il n’existe que trois films de fiction sur la Rose blanche et encore faut-il attendre les années 1980 pour les deux premiers[11]. Ce déséquilibre peut paraître paradoxal dans la mesure où Hans et Sophie Scholl (« Die Geschwister Scholl ») incarnent sûrement la forme la plus unanimiste de la résistance allemande au national-socialisme dont la commémoration est multiforme et omniprésente. À Munich, un monument très sobre rappelle leur sacrifice devant la Ludwig-Maximilians-Universität, un buste de Sophie par le sculpteur Nicolai Tregor est disposé dans son hall, et la place devant l’Université porte leur nom. Avant Albert Schweitzer, Goethe, Schiller, Geschwister-Scholl arrive en tête des dix appellations les plus usitées pour les écoles allemandes et rares sont les grandes villes qui n'ont pas donné à une de leurs rues ou de leurs places le nom de ces héros. À Karlsruhe, on trouve une Geschwister-Scholl-Straße dès 1961, une Goerdelerstraße depuis 1970 mais, il faut attendre 1991 pour qu'une rue soit baptisée Graf-Stauffenberg. C'est que la reconnaissance des protagonistes de l’attentat du 20 juillet ne s’est pas effectuée aisément. Jusque dans les années 1950, environ la moitié des Allemands refusaient toujours de donner le nom de Stauffenberg à une école car ils continuaient de considérer les conjurés du 20 juillet 1944 comme des traîtres. Depuis, leur intégration dans l’histoire officielle s’est largement accomplie : Die Stiftung Gedenkstätte Deutscher Widerstand (la Fondation sur la Résistance) est sise symboliquement Stauffenbergstraße 13 – 14 à Berlin, dans les locaux de l’ancien ministère de la Guerre du Reich.

Ce paradoxe inaugural peut être levé en évoquant en premier lieu les impératifs du cinéma de fiction. La préparation et la réalisation de l’attentat permettent de réaliser un film de guerre et d’action (voire un « thriller manichéen »[12]). En revanche, la rédaction et la diffusion des six tracts de la Rose blanche n'autorisent guère la réalisation de morceaux de bravoure.

Par ailleurs, le complot du 20 juillet active un schéma narratif fonctionnel à la fois sur le plan romanesque et idéologique. Les officiers supérieurs issus de l’aristocratie incarnent la quintessence du peuple allemand, l’Allemagne éternelle, d’autant que, comme dans le Cercle de Kreisau, se tiennent à leurs côtés des hommes d'Église ainsi que des politiciens conservateurs mais aussi sociaux-démocrates, comme Julius Leber. Face à eux, les nationaux-socialistes fanatiques relèvent du démoniaque. Si, parmi ces conjurés, certains furent des opposants de la première heure, d’autres ont pris conscience de la nécessité de mettre un terme à ce régime criminel bien plus tard, voire seulement après Stalingrad. Dès lors, le point de départ des fictions s’avère déterminant.

En juin 1955, deux films sortent en même temps. Pour écrire L’attentat du 20 juillet (Der 20. Juli), Falk Harnack travaille avec Günther Weisenborn[13], et ces deux anciens authentiques résistants obtiennent un prix (le « Bundesfilmpreis » en argent) pour leur scénario. Le film débute par le retour à Berlin de Stauffenberg (Wolfgang Preiss) après sa convalescence suite à ses blessures subies en Afrique du Nord (il porte encore l'uniforme du désert). À la sortie de la gare, à l'enthousiaste « Heil Hitler ! » du jeune membre des Jeunesses hitlériennes qui porte ses bagages, il répond par un hochement de tête entre lassitude et agacement. Il découvre la ville déjà partiellement détruite et un homme du peuple l’interpelle : « Macht mal bald Schluss damit, sonst hat das nicht mehr viel Zweck »[14]. Georg Wilhelm Pabst choisit de s'en tenir à la réalisation de l’attentat. C’est arrivé le 20 juillet (Es geschah am 20. Juli) commence le 19 juillet au soir pour s'achever dans la nuit du 20 au 21 et ne dure que 73 minutes.

En 2004 en revanche, la fiction télévisée Opération Walkyrie. Le complot pour tuer Hitler (Stauffenberg) réalisée par Jo Baier commence par un prologue qui se déroule à l’opéra de Berlin à l’été 33. Stauffenberg (Sebastian Koch) vient avec sa fiancée écouter Wagner en présence du « Führer » et les deux jeunes gens peuvent exprimer leur admiration pour le sauveur de la Nation avant de se dire leur amour : la jeunesse allemande épouse le nouveau guide. Après le générique, dans la Pologne en guerre, Stauffenberg écrit à sa femme ; la voix-off lit le contenu de la lettre :

Die Bevölkerung ist ein unglaublicher Pöbel, sehr viele Juden und sehr viel Mischvolk. Ein Volk, welches sich nur unter der Knute wohlfühlt. Die Tausenden von Gefangenen werden unserer Landwirtschaft recht gut tun[15].

Enfin, dans un troisième temps de l'exposition, mai 1942 en Biélorussie, Stauffenberg découvre par la médiation de Henning von Tresckow (Ulrich Tukur) les crimes et exactions commis par les troupes allemandes. Ne pouvant plus les supporter, il obtient son affectation en Afrique du Nord : la mort de son ordonnance, un jeune Souabe, lui donne l'occasion de laisser sa colère éclater contre le dictateur. Quant à la fiction hollywoodienne de 2008, elle s’ouvre dans le désert nord-africain ; Stauffenberg (Tom Cruise) fait état, avec courage, de son opposition résolue au national-socialisme avant d’être blessé par un avion ennemi.

Dans ce simple échantillon, seul Stauffenberg écorne l’image du héros national en rappelant son cheminement antérieur. Stauffenberg a obtenu le prix du meilleur film télévisé pour l’année 2004. Paradoxe à nouveau dans la mesure où une télévision hertzienne en général cherche à diffuser et donc à produire the least objectionable program. Mais, les deux films des années 1950 militaient pour la reconnaissance de la résistance quand la production hollywoodienne s’inscrit dans la stratégie du cinéma-monde, alors que le film produit par une chaîne publique (ARD-Produktion) s’adresse lui exclusivement au public allemand.

L'évocation des sympathies de Stauffenberg pour le régime mis en place en 1933 — sympathies bien connues des historiens[16] — a suscité de violentes réactions notamment de la part de ses proches ou de son biographe officiel, Peter Hoffmann : on n’écorne pas impunément l’image du héros. Pour autant, le rappel de ce point historique permet de valider le mythe du « peuple bourreau » (« Tätervolk »). En faisant état du passé de compagnon de route du nazisme de Stauffenberg, Jo Baier est certes fidèle à l’histoire, mais, dans le même mouvement, il active le mythe fondateur : même le héros national a été séduit et abusé. Sa mort courageuse en criant son amour pour « notre sainte Allemagne (« Es lebe unser heiliges Deutschland ») devient alors rédemption.

Autres victimes expiatoires, les membres du mouvement de la Rose blanche. Trois films de fiction fort différents lui ont été consacrés dont deux en 1982 avec la même actrice pour incarner Sophie, Lena Stolze. Impressionnante de maturité, elle est récompensée pour ces deux films, fait unique dans l'histoire du prix, par le « Bundesfilmpreis » de la meilleure actrice.

Percy Adlon choisit dans Fünf letzte Tage[17] (1982) de concentrer son propos sur les derniers moments de Sophie vus par sa compagne de cellule, Else Gebel, la narratrice. Avec un souci de dépouillement jusqu'à l'épure (les séquences sont raccordées par un écran noir, un seul accompagnement musical : le Quatuor à cordes La Jeune Fille et la Mort de Franz Schubert), Adlon trace le portrait d’une jeune femme face à la mort dans un huis clos conforme à la tradition du Kammerspiel. Les gros plans sur Sophie évoquent parfois Maria Falconetti, la Jeanne d'Arc de Carl Dreyer.

Dans Die Weiße Rose[18] (1982) au contraire, Michael Verhoeven adopte une forme classique pour se mettre entièrement au service du récit des dix mois de vie effective du groupe, de mai 1942 à février 1943. Michael Verhoeven cherche à être le plus précis possible : les contacts avec les autres groupes de résistance, les discussions sur les méthodes et la tentation de la violence, même le donjuanisme de Hans sont montrés. Lors de la première du film à la Berlinale, le générique de fin, en deux phrases terribles, rappelle que le jugement du Tribunal du Peuple a été, en quelque sorte, validé par la plus haute juridiction : « Nach Auffassung des Bundesgerichtshofs bestehen die Urteile gegen die „Weiße Rose“ zu Recht. Sie gelten noch immer »[19]. C'est un pavé dans les eaux de la mémoire nationale. L'accusant de calomnier la Cour Suprême fédérale (« Bundesgerichtshof »), sa jurisprudence et, in fine, le gouvernement, le ministère des Affaires étrangères décide de boycotter Die weiße Rose. En conséquence, les Goethe Institute ne pourront pas le présenter à l'étranger, et seules les classes terminales des Gymnasium pourront le voir après une préparation spéciale en amont. Quand le cinéma rencontre effectivement l'histoire : la polémique suscitée par le film relance les travaux et les publications sur la Rose blanche et, le 25 janvier 1985, le Bundestag vote à l'unanimité une motion qui stipule que le Tribunal du Peuple (« Volksgerichtshof ») n'a pas été le tribunal d'un État de droit mais un instrument de terreur au service du despotisme national-socialiste.

Dernier opus en date, en 2005, avec Sophie Scholl, les derniers jours (Sophie Scholl – Die letzten Tage), Marc Rothemund resserre son récit sur la fin de Sophie comme le titre du film l'indique bien.

Dans le premier film évoqué, Sophie demande à Else Gebel, sa compagne de cellule, si elle a eu des sympathies pour les nationaux-socialistes. Suite à sa réponse sans équivoque (« Non, jamais. » /« Nein, Nie. »), Sophie avoue ses erreurs de jeunesse : « Uns hat die HJ imponiert, besonders dem Hans. Lagerfeuer, Heimatliebe, Kameradschaft, Singen und Ausflüge und das alles. Ich war sogar BDM-Führerin. »[20] Dans le troisième, c'est Robert Mohr, l'inspecteur de la Gestapo, qui rappelle à Sophie son adhésion au mouvement de jeunesse. Effectivement, tout comme son frère, Sophie a été séduite par le national-socialisme lorsqu’elle était enfant, mais ils s’en sont très vite détournés. En revanche dans le film de Michael Verhoeven, sûrement le plus vériste, il n'est pas fait mention de ce péché de jeunesse. Les deux films qui évoquent l’adhésion au nazisme sont centrés sur Sophie et mettent en avant le fondement chrétien de son engagement. Dans le huis clos de Percy Adlon, Sophie dialogue avec Else, la militante communiste ayant perdu la foi dans la doctrine qui l'a conduite en prison. Dans le dernier opus, le christianisme de Sophie s'oppose avec force à l'athéisme du national-socialiste et homme du peuple, Robert Mohr. Hors contexte, hors histoire, dépolitisé, l’engagement de Sophie Scholl apparaît comme le fruit d’un cheminement spirituel. Le rappel de son engagement dans les jeunesses hitlériennes (BDM) fait d'elle une jeune Allemande comme les autres, et son courage en devient encore plus extraordinaire. Marc Rothemund explique son choix de centrer le récit sur Sophie. À la question « Warum haben Sie sich nicht auf Hans Scholl konzentriert ? », il répond :

Er ist der politische Kopf von Anfang an, ein Intellektueller, ein Kämpfer. Für mich war es spannend, herauszufinden, wie ein kleines Rädchen im Getriebe der Gestapo reagiert, wie die junge Frau damit umgeht, wie ihr Nervenkostüm beschaffen ist[21].

Cette mise à l’écart délibérée du politique lui permet de construire une fiction unanimiste et d’éviter ainsi de segmenter le public : en l’espèce, cet apolitisme revendiqué remplit deux fonctions complémentaires, l’une idéologique, l’autre commerciale. Une moisson de prix et un succès public en Allemagne : l'accueil atteste la justesse de sa démarche et dit bien que les propos tenus rencontrent l'intérêt et les attentes sociales.

Devenus de jeunes adultes, les Scholl ont pris la mesure de la supercherie national-socialiste et ont osé défier la dictature. Ils y laisseront la vie avec un courage exceptionnel qui leur confère indéniablement une stature de martyr. Cette mort héroïque constitue le deuxième point commun avec la représentation des conjurés du 20 juillet : une communauté d'âme avec le peuple allemand – ils ont été « abusés »  – et une révolte vaine, mais sanctionnée par le sacrifice ultime, qui vaut rédemption.

Edelweißpiraten

Présents dans les grandes villes de la Ruhr, les « Edelweißpiraten » (les Pirates de l’Edelweiss)[22], évalués à plusieurs centaines de membres (les fiches de la Gestapo en recensent 3000 rien qu'à Cologne), faisaient le coup de poing contre les jeunesses hitlériennes, cachaient des Juifs, aidaient les travailleurs forcés en leur donnant de la nourriture ou du sel. Issus de la classe ouvrière, ils partageaient des valeurs socialistes révolutionnaires, communistes ou anarchistes. Bien plus pragmatiques que les étudiants de la Rose blanche, ils rédigent des tracts beaucoup plus courts qui se résument à quelques formules choc destinées à frapper les imaginations : « Macht endlich Schluss mit der braunen Horde! Wir kommen um in diesem Elend. Diese Welt ist nicht mehr unsere Welt. Wir müssen kämpfen für eine andere Welt, wir kommen um in diesem Elend »[23]. Ils prennent en compte la réalité de la terreur nationale-socialiste : si un passant trouve un tract, pris de peur, il n'aura pas le temps de lire un texte plus long.

En 2001, Niko von Glasow réalise enfin Edelweiss Pirates (Edelweißpiraten) à Saint-Pétersbourg et Budapest.  Enfin, car il a rencontré bien des difficultés pour monter le financement de son projet : « Der Widerstand gegen den Film war groß und lang » note-t-il[24]. Le film est prêt en 2002 et la résistance contre le film continue. La première mondiale se déroule à Montréal le 29 août 2004. Présenté à la Berlinale en février 2005 la même année que Sophie Scholl – Les derniers jours, le film reçoit un bon accueil mais peine néanmoins à trouver un distributeur pour ne sortir finalement en Allemagne que le 10 novembre 2005. Une courte vie commerciale plus tard, il est retiré de l'affiche après que seulement quelques milliers d'Allemands ont pu le voir : à peine 26 877 entrées en janvier 2006. Cette sanction sans appel exclut, de fait, une diffusion à l'étranger.

On peut certes chercher les raisons de ce cinglant échec dans les choix de Niko von Glasow et de sa scénariste Kiki von Glasow, choix formels comme narratifs cohérents, afin de réaliser selon leurs vœux un film « souterrain » (« Untergrundfilm ») pour rendre compte d'un mouvement « souterrain » (« Untergrundbewegung »). La caméra est portée à l'épaule, et l'image n'est pas léchée. Ce ne sont pas là des concessions à l'esthétique à la mode des films d'auteur : le chaos est rendu perceptible. Le confort visuel du spectateur s'en trouve fortement malmené, mais, ajoute Niko von Glasow : « Krieg und Widerstand sind nichts Feines »[25].

Le récit filmique est construit sur un flash-back : les Américains entrent dans Cologne pendant que les membres de la Gestapo rassemblent leurs prisonniers contre un mur en attendant les ordres de Kaltenbrunner depuis Berlin. Finalement, leur chef se suicide et les exécutions sont suspendues. Parmi les prisonniers libérés, un jeune homme, Karl (Ivan Stebunov, un russe non germanophone), peut devenir le narrateur du groupe Köln-Ehrenfeld qui a connu un destin particulièrement tragique : treize de ses membres ont été pendus sans jugement le 10 novembre 1944 dans la Hüttenstraße à Ehrenfeld. Les plus jeunes d’entre eux, Günther Schwarz et Johann Müller, n’avaient que seize ans, comme Peter, le jeune frère de Karl dans la fiction. Or, Karl doit la vie et donc sa capacité à témoigner parce qu'il a dénoncé à la Gestapo Hans Steinbrück (Bela B. Felsenheimer), l'adulte leader du groupe, afin de sauver son jeune frère. Trahison qui n'aura servi à rien. Dans ces temps déraisonnables, il ne saurait exister de héros d’autant que le spectateur peut même soupçonner Karl d’avoir agi par jalousie, Hans étant l’amant de Cilly, la femme du frère de Karl tombé sur le front de l’Est. Ce refus très fin de siècle de toute héroïcité contrarie évidemment l'identification des spectateurs et leur interdit une forme commune de plaisir au film.

Le temps diégétique ne prend en compte que la dernière année de la guerre à Cologne, déjà en ruines : tous les illégaux (évadés, déserteurs, sans papiers) peuvent y trouver un refuge précaire, et il s'y développe une société clandestine (« Untergrund »). La ville est en proie à une terrible violence : bombardements incessants, conditions d'existence cauchemardesques, meurtres et brutalités sans arrêt car la vie a perdu toute valeur. Violences qui culminent dans le film avec la rafle de la Gestapo. Les membres du groupe sont malmenés, jetés au bas des escaliers, tondus grossièrement pour souligner leur déchéance puis torturés. Le traitement des « Edelweißpiraten » par la Gestapo diffère radicalement de celui réservé aux membres de la Rose blanche et singulièrement à Sophie Scholl (du moins tel que les trois cinéastes ont unanimement choisi de le montrer : les enquêteurs la respectent et la vouvoient. Même Else Gebel jouit d'un régime de semi-liberté dans les locaux de la Gestapo où elle fait fonction de greffière dans Fünf letzte Tage). Enfin, la pendaison est montrée dans toute sa cruauté. Depuis la voiture de la Gestapo, Karl assiste même à l'exécution de ses compagnons et de son jeune frère qui a refusé, lui, de trahir : pour ajouter à sa mauvaise conscience et à celle des spectateurs ?

Ces choix d'écriture ne permettent pas d'évoquer les « Edelweißpiraten » avant la guerre. Inscrits dans la grande tradition des « Wandervögel », les « Edelweißpiraten » organisaient des excursions à pied en pleine nature avec feux de camps et chants accompagnés d'instruments de musique. Cette profondeur historique aurait eu l'immense mérite de compléter le tableau et de donner aux spectateurs quelques clés pour comprendre leurs choix idéologiques et l'évolution qui les a conduits du refus du national-socialisme — principalement à travers le refus de l’embrigadement dans les Jeunesses hitlériennes — à la résistance active. Sans elles, le spectateur éprouve bien du mal à comprendre leurs motivations et peut penser qu'ils sont dépourvus de références idéologiques. Le mouvement des « Edelweißpiraten » semble réduit à une sorte de révolte spontanée, et non pensée. Le ralliement de Peter, un membre militant des Jeunesses hitlériennes, est caractéristique. Lorsqu’il comprend que son père a été envoyé sur le front de l’Est parce qu’il était contre le national-socialisme, il devient un « Edelweißpirat » convaincu, jusqu’à accompagner Hans Steinbrück, son père de substitution, dans la mort. Cette psychologisation de l’engagement de Peter est conforme au discours apolitique du film. La seule référence politique dans le film est incarnée par une infirmière communiste qui s'oppose aux méthodes « gauchistes » du groupe. Revendiqué par Niko von Glasow qui considère, dans son entretien, les « Edelweißpiraten » comme « un mouvement sans mouvement »  (« Es war eine riesige Bewegung, ohne eine Bewegung zu sein »). Cet apolitisme aurait pu servir la carrière du film. Il n’en a rien été.

 

L'échec du film peut également s'expliquer par la difficulté éprouvée en Allemagne pour prendre en compte cette forme de résistance. Les actions des « inorganisés » comme les « Edelweißpiraten » étaient assimilées par le régime national-socialiste à de la délinquance afin d’en réduire la portée politique et d’éviter toute propagation du mauvais exemple : l’enrôlement dans un bataillon disciplinaire ou l’internement dans un camp de concentration[26] étaient préférables à un procès par une cour ordinaire et d’une efficacité tout aussi radicale. On ne connaît pas le nombre exact d' « Edelweißpiraten » victimes du national-socialisme ; une seule chose est sûre : fort peu ont survécu.

Le jugement officiel n’a pas été vraiment révisé après guerre ; loin s’en faut. Né le 6 janvier 1928 à Dortmund dans un quartier d'ouvriers et dans une famille anarchiste, Kurt Piehl fait partie des Edelweißpiraten. Arrêté plusieurs fois, il blesse un agent de la Gestapo lors d’une interpellation. De retour à Dortmund en juin 1949, il est interpellé et incarcéré dans la prison qu’il connaît bien pour y avoir été torturé. Le mandat d'arrêt qui date de la période nazie porte sur trouble à l'ordre public accompagné de coups et blessures graves. Deux anciens agents de la Gestapo qui poursuivent leur carrière dans la police de la République fédérale viennent témoigner. Le juge évoque la légitime défense pour le déclarer non coupable. Dès 1952, la mère de Bartholomäus Schink, exécuté avec ses douze camarades à Ehrenfeld, a entrepris une procédure de réhabilitation qui s’est soldée par une série de jugements successifs en 1957, 1958 puis à nouveau en 1978, qui l’ont tous déboutée en confirmant le jugement national-socialiste. En 1984, la sœur de Barthel Schink a reçu en son nom la distinction de Juste parmi les Nations du mémorial de Yad Vashem, distinction que reçoit également un survivant du groupe, Jean Jülich (présent dans le film, il interprète Karl âgé). La procédure est alors reprise une nouvelle fois et aboutit enfin à la réhabilitation des treize victimes de la barbarie nazie et globalement de tous les membres des Edelweißpiraten. Depuis le 9 novembre 2003, une plaque à Cologne rappelle leur sacrifice ; une rue porte le nom de Bartholomäus Schink et même un Festival de musique au nom du groupe est organisé en Rhénanie depuis juin 2005 avec la participation des derniers survivants comme Jean Jülich ou Gertrud Koch.

La disparition

Dans tous les films visionnés, les références politiques sont de toute façon bien ténues. La question politique est rarement abordée car il s'agit de montrer que la résistance était avant tout une insurrection morale contre la barbarie et pour un renouveau national. Sur ces bases, les scénaristes sont assurés de fédérer le plus large public et travaillent à cimenter l'édifice national.

Néanmoins, lorsqu’un scénario concède une modeste place au discours politique, il n'est question que des partis traditionnels : chrétiens, sociaux-démocrates et communistes. Die weiße Rose fait explicitement référence à des mouvements politiques. Les enquêteurs de la Gestapo analysent le contenu des tracts pour essayer de déterminer qui les a rédigés. Deux interprétations contradictoires s'opposent : communiste ou catholique. Plus tard dans le récit, après le désastre de Stalingrad, lors d'une réunion du groupe avec leur contact auprès des officiers, Hans pose la question centrale de la coordination avec les autres mouvements de résistance : Églises, sociaux-démocrates, communistes. Kurt Huber réagit violemment : il ne travaillera pas avec les « Bolcheviques ». Enfin, une troisième séquence cite des passages du cinquième tract. Rédigé pendant l'hiver 1942-1943, au paroxysme de la bataille de Stalingrad, ce tract est le plus politique. Intitulé « Appel à tous les Allemands », il est distribué à des milliers d'exemplaires dans plusieurs grandes villes. Une date s’inscrit sur l’écran : 13/01/43. La ronéo tourne et trois citations emblématiques apparaissent successivement. Le spectateur peut lire : « Das Kommende Deutschland kann nur föderalistisch sein » ; « Befreiung der Arbeiterschaft durch vernünftigen Sozialismus » ; « Jedes Volk, jeder Einzelne hat ein Recht auf die Güter der Welt »[27].

Die weiße Rose fait figure d’exception. Les deux autres films consacrés à Sophie Scholl se caractérisent par l'apolitisme qui constitue également une des qualités distinctives des officiers supérieurs comme le général Haras, le général du diable[28], qui s'oppose de manière instinctive au national-socialisme, comme si sa conduite était dictée par sa nature d'authentique Allemand et d'officier supérieur.

Dans L’attentat du 20 juillet en revanche, les scénaristes, Falk Harnack et Günther Weisenborn, ont tenu à montrer plusieurs aspects de la résistance. Au sein du Cercle de Kreisau, des discussions ont lieu sur l'Allemagne de demain. À la monarchie sociale du Docteur Goerdeler, Küfer, le personnage fictionnel qui représente Julius Leber, préfère une véritable démocratie sociale : deux civils parlent politique en présence des officiers supérieurs, qui n'interviennent pas dans le débat. Par ailleurs, Küfer organise des actions de propagande : tracts et slogans sur les murs. 

Même dans le film Edelweiß Pirates, il n'est jamais question de politique, a fortiori d'anarchistes : ils ont disparu. Ont-ils pris part à la résistance, ont-ils même existé ? Dans Les Résistances Allemandes à Hitler, Gilbert Merlio, consacre deux chapitres à « la résistance ouvrière de gauche », le premier aux communistes et le second aux sociaux-démocrates[29]. La légende de l’iconographie respecte ce choix : seuls des communistes et des sociaux-démocrates semblent arriver au camp d’Oranienburg. Cette présentation des faits est très répandue. Ainsi la retrouve-t-on sur les différents sites consacrés à la résistance ou dans les expositions sur ce thème. Le Mémorial de la Résistance allemande de Berlin recense parmi les résistants issus du mouvement ouvrier les communistes, les sociaux-démocrates et les syndicalistes[30].

La mémoire officielle

Forcément simplificatrice et idéologique, la mémoire officielle ne retient donc que les partis institutionnels : sociaux-démocrates et communistes. Pourtant, dans le camp d’Oranienburg, au moins un anarchiste fort connu a été emprisonné avant d’y être assassiné le 10 juillet 1934. George Grosz a même peint un tableau célèbre, intitulé C’était un écrivain, pour rendre compte de ce crime qui a suscité un grand émoi dans l’intelligentsia. À la fois publiciste et poète, Erich Mühsam a été arrêté le 28 février 1933, le lendemain de l’incendie du Reichstag puis envoyé au camp d’Oranienburg dès son ouverture : ni les sociaux-démocrates, ni les communistes n’ont pu physiquement l’y précéder. Gilbert Merlio fait bien une référence à l’arrestation de Mühsam mais dans le chapitre consacré à la résistance communiste, et il le classe dans la catégorie des « intellectuels de gauche mis sous les verrous »[31] en compagnie de Ludwig Renn et Egon Erwin Kisch, deux intellectuels communistes, et de Carl von Ossietzky. Pourtant, les deux communistes ne sont pas restés bien longtemps internés et ont survécu à la guerre. Arnold Friedrich Vieth von Golßenau, alias Ludwig Renn, est resté deux ans en prison avant de rejoindre le Bataillon Thälmann des Brigades Internationales ; membre du SED, il meurt en RDA en 1979. Quant à Egon Erwin Kisch, il a tout de suite été relâché en raison de sa nationalité tchécoslovaque, et il est mort à Prague en 1948. Ce n’est pas le cas du successeur de Kurt Tucholsky à la direction de Die Weltbühne : libéré suite à une campagne internationale en novembre 1936 car gravement malade et après avoir reçu le prix Nobel de la Paix, Carl von Ossietzky est mort le 4 mai 1938. Quant à l’anarchiste Erich Mühsam, il a été humilié, martyrisé pendant toute sa détention avant d’être finalement tué par ses geôliers.

Erich Mühsam n’est évidemment pas le seul anarchiste emprisonné et assassiné par les nationaux-socialistes. Comment pourrait-il en être autrement en Allemagne où, à côté du SPD puissant, légaliste et bureaucratisé, et du KPD, totalement inféodé à Moscou, existait un mouvement anarchiste qui a même connu un renouveau dans les années vingt. C'est à Berlin en décembre 1922 que se reconstitue l'AIT[32] avec comme premier secrétaire général Rudolf Rocker, le grand théoricien anarchiste, et son siège y reste jusqu’en 1933. Dès l’arrivée de Hitler à la chancellerie, les militants anarchistes furent pourchassés, emprisonnés et exécutés ; leurs locaux furent mis à sac, leurs organes de presse interdits. En exil, ils fondent en 1933-1934 le groupe Deutsche Anarcho-syndikalisten (D.A.S.) à Amsterdam. Après le 19 juillet 1936, beaucoup de militants se rendent en Espagne pour participer à la Révolution. Symbole fort, le 22 novembre 1936, c’est Carl Einstein[33], membre des D.A.S., qui rédige l’éloge funèbre pour l’enterrement de Durruti diffusé par Radio Barcelone.

Ces données fort succinctes attestent a minima de l’existence des anarchistes en Allemagne. La réduction de « la résistance ouvrière de gauche » aux seuls partis officiels (SPD et KPD), y compris dans des travaux d’universitaires, pose avec acuité la question de la constitution de la mémoire historique, qui fonctionne nécessairement à l’amnésie élective dans un procès d’élaboration d’identités collectives. Les groupes constitués (Partis, Églises, syndicats mais aussi associations sportives ou culturelles) se construisent une mémoire commune qu’ils utilisent, dans un mouvement dialectique, pour dire leur unité et fonder leur légitimité à la fois à l’intérieur du groupe et dans l’ensemble du corps social.

Les communistes allemands ont disposé de l’ensemble des appareils idéologiques d’un État pendant quarante ans et du relais de tout le mouvement communiste mondial qui a fait de son combat contre le national-socialisme son instrument privilégié de légitimation (« La Grande Guerre Patriotique » pour les soviétiques, le PCF et ses « 75000 fusillés »). Présents au Parlement de la RFA, les socialistes ont bien sûr veillé à la prise en compte de leur participation à la résistance au national-socialisme. À l’instar des sectes protestantes[34] qui ne disposent pas de la légitimité et de la puissance des grandes Églises institutionnelles, les anarchistes n’ont pu compter que sur eux-mêmes[35] pour lutter contre l’oubli de leur participation à cette histoire terrible, tant ils continuent de troubler les représentations officielles. Et c'est pourquoi, eux aussi, ils resteront dans l'ombre.

in, Le national-socialisme dans le cinéma allemand contemporain, Héléne Camarade, Elizabeth Guilhamon, Claire Kaiser (éds), Lille, PU du Septentrion ("Mondes Germaniques"), mars 2013, pp.167-180.



[1] Inge Deutschkron, Sie blieben im Schatten. Ein Denkmal für „stille Helden“, Berlin, Hentrich, 1996.

[2] Peter Steinbach, « Unbesungene Helden », in : Günther B. Ginzel (Éd.), Mut zur Menschlichkeit, Köln-Bonn, Rheinland-Verlag, 1993, p. 183 - 203.

[3] Traduction : « Parmi les paysans, sauveurs dans la nuit ».

[4] La simple existence de ces „stille Helden“  brise le système de défense mis en place à la fin de la guerre pour trouver des circonstances atténuantes au „Tätervolk“ : „man habe über die Verbrechen im Osten nichts gewusst und gegen die Judenverfolgung nichts tun können“. Voir Beate Kosmala, « Stille Helden im Widerstand gegen die Judenverfolgung 1941-1945, Forschung und Erinnerung », in : Camarade, N. Willmann (Dir.), Mémoires et représentations de la résistance allemande au national-socialisme en RDA et République fédérale d'Allemagne, Revue d'Allemagne et des pays de langue allemande (4/2010), p. 35-551.

[5] Notes sur le concept du film rédigées par Marc Rothemund et Fred Breinersdorfer pour le dossier de presse du distributeur, Sophie Scholl – Die letzten Tage (Sophie Scholl, les derniers jours, Les Acacias, 2005). Voir Jean-Marie Tixier, Mémoire(s) de la résistance allemande : Sophie Scholl, les derniers jours…de la plus qu’humaine ? Dossier Festival du Film d’Histoire de Pessac, 2007.

[6] Johann Chapoutot, Le meurtre de Weimar, PUF, Paris, 2010.

[7] Jean-Clément Martin, « Dans la guerre civile, tout est permis », L’Histoire, n° 267, juillet-août 2002, pp. 56-59.

[8] En France, des centaines d’Allemands ont pris une part active à la Résistance. Voir Hélène Camarade, « Les Allemands dans la résistance en France (1940-1945) : un trou de mémoire en République fédérale d’Allemagne », in : Cahiers d’études germaniques, n°57, 2009, pp. 137-155.

[9]  Traduction : « peuple de bourreaux ». NdÉ.

[10] Discours du Pape Benoît XVI, Visite du camp de concentration d’Auschwitz, le 28 mai 2006, Libreria Editrice Vaticana,

http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2006/may/documents/hf_ben-xvi_spe_20060528_auschwitz-birkenau_fr.html (Consulté le 22. 04. 2011).

[11] Le premier grand documentaire n’est réalisé qu’en 2008 : Die Widerständigen – Zeugen der Weißen Rose par Katrin Seybold, une production de la RBB (Rundfunk Berlin-Brandenburg).

[12] Cécile Mury, « Walkyrie », Télérama, n°3081, 28 janvier 2009, p. 41.

[13] Résistant de la première heure, membre de l’Orchestre Rouge, Weisenborn est l’auteur de la première grande histoire de la résistance allemande publiée dès 1953 sous le titre Der lautlose Aufstand, disponible en français sous le titre Une Allemagne contre Hitler, Paris, Éditions du Félin, 2000. Lire Nadine Willmann, Günther Weisenborn – un écrivain de la résistance allemande, Paris, L’Harmattan, 2007.

[14] Traduction libre : « Dépêchez-vous d’en finir, sinon cela n’aura plus beaucoup de sens. »

[15] « La population est une incroyable populace, très nombreux Juifs et très nombreux sang mêlés. Un peuple qui ne se sent bien que sous le knout. Les milliers de prisonniers vont faire vraiment du bien à notre agriculture. »

[16]  Voir Jürgen Schmädeke /Peter Steinbach (Éd.), Der Widerstand gegen den Nationalsozialismus. Die deutsche Gesellschaft und der Widerstand gegen Hitler, Munich, Piper Verlag, 1986. Directeur scientifique du Gedenkstätte Deutscher Widerstand, Peter Steinbach a été consulté pour la rédaction du scénario de „Stauffenberg“ sans être crédité au générique.

[17] Traduction : « Cinq derniers jours ».

[18] Traduction : « La Rose blanche ».

[19] Traduction libre : « La Cour suprême fédérale considère les jugements contre la Rose blanche conformes au droit. Ils sont toujours valides. »

[20] Traduction libre : « Les Jeunesses hitlériennes (HJ) nous impressionnaient, surtout Hans. Feux de camp, amour de la patrie, camaraderie, chants, excursions et tout cela. J'ai même été cheftaine chez les jeunes filles des Jeunesses hitlériennes (BDM). »

[21] Entretien avec Margret Köhler pour le site kinofenster.de, 20 avril 2005. Traduction libre : « Pourquoi ne vous êtes-vous pas focalisé sur Hans Scholl ? » « Il est la tête politique depuis le début, un intellectuel, un combattant. Pour moi, c’était plus passionnant de comprendre comment un petit rouage réagit dans le fonctionnement de la Gestapo, comment la jeune femme y fait face, comment son psychisme se construit. »

[22] Le terme « Edelweißpiraten » est devenu générique pour tous les mouvements de jeunesse en opposition radicale avec le nazisme. Chaque groupe se choisissait son nom parfois en reprenant même les insultes des nazis : « Navajos », « Fahrtenjungs », « Ruhrpiraten », « Meuten », etc.

[23] Traduction libre : « Il faut en finir avec la horde brune ! Nous mourons dans cette misère. Ce monde n'est pas notre monde. Nous devons combattre pour un autre monde. Nous mourons dans cette misère. »

[24] Traduction libre : « La résistance contre le film a été grande et longue. » Niko von Glasow dans l’entretien joint au DVD, Koch Media GmbH – DVD, 2007.

[25] Traduction libre : « La guerre et la résistance n’ont rien de raffiné. », ibid.

[26] Des camps de concentration ont même été créés spécialement pour accueillir les mineurs asociaux : à Moringen pour les garçons et à Uckermark, près de Ravensbrück pour les filles.

[27] Traduction libre : « La future Allemagne ne peut être que fédérale » ; « Libération des travailleurs par un socialisme raisonné » ; « Tous les peuples, tous les individus ont droit aux biens de ce monde. »

[28] Curd Jürgens dans Le général du Diable (Des Teufels General) d’Helmut Käutner (1955), une adaptation de la pièce à succès de Carl Zuckmayer de 1946.

[29] Gilbert Merlio, Les Résistances Allemandes à Hitler, Paris, Tallandier, 2003, p. 49 et suivantes.

[30] Comme l’a fort bien souligné André Combes lors du colloque « Le national-socialisme dans le cinéma allemand contemporain : un changement de paradigme? », organisé à Bordeaux  les 25 et 26 mars 2010, le sens de Gewerkschaftler ou de Gewerkschaftsmitglieder différe radicalement de celui de Syndikalist, à connotation révolutionnaire. L’hebdomadaire de la FAUD (Freie Arbeiter Union Deutschland), Der Syndikalist, était tiré à plus de 100 000 exemplaires.

[31] Ibid., p. 54.

[32] L' « Association internationale des travailleurs » ou « Internationale Arbeiter-Assoziation ».

[33] Voir Liliane Meffre, Carl Einstein, 1885-1940. Itinéraires d’une pensée moderne, Paris, P.U. Paris-Sorbonne, 2003.

[34] Voir Sylvie Graffard et Léo Tristan, Les Bibelforscher et le nazisme (1933-1945). Ces oubliés de l'Histoire, Paris, Edition Tirésias, 1999 et Simone Liebster, Allein vor dem Löwen, Ein kleines Mädchen widersteht dem NS-Regime, Luxemburg, Schortgen, 1999.

[35] Voir La résistance anarcho-syndicaliste allemande au nazisme dans la Ruhr et en Rhénanie, 1933-1945, collectif, Paris, Editions du Monde Libertaire, avril 2001 ; Andreas G. Graf, Anarchisten gegen Hitler. Anarchisten, Anarcho-Syndikalisten, Rätekommunisten in Widerstand und Exil, Berlin, Lukas Verlag, 2000 ; Oliver Steinke, Wo dein Platz, Genosse, ist… Widerstand der KPD und anderer Gruppen aus der Arbeiterbewegung gegen die faschistische Diktatur in Deutschland 1933-1945 aus libertärer Sicht, Moers, Syndikat-A, 2007.